> VENDREDI 09 DÉCEMBRE 2016 |
Hubert Reeves |
Fonction Astrophysicien, défenseur de l’environnement et président d’honneur de l’Agence française pour la biodiversité |
Amoureux de la vie, du cosmos à la biodiversité
La biodiversité ? Hubert Reeves l’a expérimentée gamin entre les roseaux du lac Saint-Louis, au Québec, où sa famille possédait une maison de campagne : « J’ai vécu d’inoubliables escapades dans les marécages. Je m’immergeais dans des ambiances paradisiaques, au milieu de cette vie aquatique si riche. J’adorais être au milieu des grenouilles, des papillons et des oiseaux ».
1932 |
Naissance à Montréal |
1960 |
PhD en astrophysique nucléaire sous la direction de E.E Salpeter Ithaca, État de New York |
2001 |
Président de l’association devenue en 2012 Humanité et biodiversité |
2016 |
Président d’honneur de l’Agence française de la biodiversité |
Curieux de tout et féru de maths, fou du ciel et gourmand des histoires de sa grand-mère, le jeune homme a embrassé l’astrophysique au mitan du XXe siècle. Quoi de mieux que le cosmos pour « un appétit sans bornes » ? Après une maîtrise de physique, il soutient en 1960 une thèse de doctorat sur les réactions thermonucléaires à Cornell, aux Etats-Unis et se prend d’amour -entre autres- pour le trio d’éléments légers « lithium-béryllium-bore ». Le chercheur collabore avec la Nasa, participe à des projets de recherche et enseigne à Montréal ou à New-York. Puis, en 1964, le québécois rallie l’Europe, en Belgique, puis en France. Sans cesser de voyager, d’écouter de la musique, de frissonner sous le ciel d’août. Quand il ne prend pas « des bains d’arbres » à Malicorne, le village de l’Yonne où il habite lorsqu’il n’est pas à Paris.
Dans l’Hexagone où il devient directeur de recherches au CNRS dès 1965 -et poursuit ses travaux sur la nucléosynthèse stellaire- Hubert Reeves s’investit dans la vulgarisation scientifique. Après un opus sur le Soleil, en 1977, il publie son premier classique « Patience dans l’azur » où il narre, en romancier, l’origine et l’histoire de l’univers. Le succès amène d’autres livres - Poussières d’étoiles, L’heure de s’enivrer.., et entraîne l’auteur dans un dialogue vivant avec le public, qui passe par ses propres écrits et les milliers de lettres qu’il reçoit, mais aussi par des conférences et spectacles musicaux, films, émissions de radio.
Un « réveil vert »
Loin de s’en tenir à la célébration béate de la nature, le scientifique la défend ardemment contre les dangers qui la menacent. Dans les années 1990, il rejoint Théodore Monod dans l’association de défense de la nature Roc, dont il devient président en 2001 et qui prend en 2012 le nom d’Humanité et biodiversité. « Il a fallu 13,7 milliards d’années de complexification - une complexification d’une créativité exubérante!, s’enthousiasme-t-il, pour que les atomes nés à la mort des étoiles s’associent en molécules, celles-ci en cellules, puis en organismes pluri-cellulaires. Pour que la biodiversité se constitue, avec des millions d’espèces dont la nôtre, la seule qui puisse découvrir ses origines stellaires ».
Sauf qu’à la « belle histoire » de l’univers, le scientifique oppose « la moins belle histoire », lorsque les humains produisent aussi la pollution, le dérèglement du climat et l’érosion de la biodiversité. Dans son ouvrage « Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve », il explique « qu’on peut mettre en corrélation les dates d’arrivée des humains sur une nouvelle terre et l’élimination de très nombreuses espèces (...) depuis cent mille ans, l’homme saccage sa planète » et risque sa survie.
Face au péril, Hubert Reeves invoque un « réveil vert ». Il propose, s’inspirant de l’écologiste américain Aldo Leopold, une « éthique de la Terre qui élargit les frontières de la communauté humaine pour y inclure les sols, les eaux, les plantes et les animaux. Il s’agit d’un nouvel humanisme, étendu à la biosphère et à tous les éléments auxquels nous sommes de près ou de loin reliés pour notre existence ». Survivrons-nous à l’érosion de la biodiversité ? Le président d’honneur de l’Agence française de la biodiversité conclut ainsi le livre où il raconte l’univers à ses huit petits-enfants : « La réponse appartient aux Terriens actuels ».