Version imprimable
Académie-de-lEau
vendredi 03 juin 2016

Le droit à l'eau à l'Assemblée nationale

Le 14 juin 2016, l’Assemblée nationale examinera une proposition de loi intitulée « Mise en œuvre effective du droit humain à l’eau potable et à l’assainissement » préparée par le député Michel Lesage, rapporteur. Cette proposition concerne en premier lieu les personnes les plus démunies et traite de l’accès à l’eau potable, à des toilettes et à d’autres équipements sanitaires.

[Communiqué de l'Académie de l'eau]

Comme il existe en France des milliers de ménages sans branchement à l’eau potable, la proposition  de loi met l’accent sur la nécessité de disposer dans chaque commune de points d’eau potable auxquels les usagers  sans branchement  pourront s’approvisionner librement. Dans les communes de plus de 3 500 habitants, un accès  à des toilettes publiques sera organisé. Dans les collectivités de plus de 15 000 habitants, il faudra prévoir des douches et

des laveries auxquels les personnes sans branchement auront accès gratuitement. Ces dispositions sont déjà mises en œuvre sur une grande échelle conformément aux obligations des collectivités en matière d’hygiène et de  salubrité. Elles permettront de donner accès à l’eau et à l’assainissement à des  touristes, gens du voyage,  SDF et  migrants. Le coût de ces mesures sera très limité  car il y a relativement  peu de personnes en  France sans branchement  à l’eau potable et toutes les mairies disposent à la fois de l’eau courante et de toilettes.

La proposition de loi vise principalement  les nombreuses personnes en situation de précarité qui ont du mal à payer leur alimentation en eau. Elle définit celles qui devraient bénéficier d’une aide publique pour compenser le prix relativement élevé de l’eau et de l’assainissement au regard de leurs revenus et  se réfère à  un plafond de 3% de ces revenus à consacrer aux dépenses d’eau  et d’assainissement.

Concrètement, seuls les usagers ayant de faibles revenus  dans les zones d’eau chère recevront une allocation  forfaitaire d’eau d’un montant qui varie en fonction de la taille du ménage et ses revenus. Le nombre de bénéficiaires potentiels  de cette allocation  forfaitaire d’eau pourrait atteindre un million de ménages démunis.

Le financement des dépenses de solidarité pour l’eau (50 M€/an) sera assuré par une petite redevance sur la consommation d’eau (un demi centime d’Euro par litre d’eau embouteillée). Bien que  les consommateurs dans leur grande majorité  soient prêts à verser une petite allocation  de solidarité, certaines entreprises  et certaines personnes  ne supportent pas l’idée d’alourdir le prix de l’eau embouteillée ne fût-ce que d’un demi-centime.

La proposition de loi comporte plusieurs dispositions pour s’assurer  de la mise en œuvre effective du droit à l’eau et à l’assainissement. La Commission consultative sur les services publics locaux (CCSPL) sera informée des projets qui affectent de manière sensible de droit à l’eau et à l’assainissement. Le Maire évoquera dans son rapport annuel (RPQS) les mesures prises pour améliorer la mise en œuvre de ce droit et organisera au sein du conseil municipal un débat sur ce sujet. Le Conseil National de l’Eau (CNE) sera informé des mesures prises au plan local et soumettra au Parlement un rapport triennal sur le droit à l’eau et  à l’assainissement.

Auparavant, l’Assemblée nationale  a reçu d’autres propositions  de loi sur le droit à l’eau. Comme l’a écrit récemment l’actuel Président du Comité National de l’Eau, le député Jean Launay, « la réalisation de ce droit de l’homme me paraît primordiale ». Son prédécesseur, le député André Flajolet,  était tellement persuadé de cette priorité qu’il avait lui-même déposé une proposition de loi à cette fin. En décembre 2010, la Ministre Nathalie Kosciusko-Morizet déclarait : « Nous sommes déterminés à ajouter un volet préventif au volet curatif » pour l’aide pour l’eau des plus démunis ». En 2011, le Sénat adoptait à l’unanimité

un texte voisin de celui en débat actuellement. En 2013,  une nouvelle proposition de loi sur le droit à l’eau a été  déposée par le député Jean Glavany et des députés de cinq partis (UDI, MRG,  PS, PC, EELV). Nul doute que le texte actuellement en discussion sera encore amendé. Chacun pourra voir dans quelle mesure un droit reconnu officiellement par la France en 2010 aux Nations unies peut devenir effectif  en  droit français.

*   *   *

L’Académie de l’Eau  a constamment soutenu les initiatives prises pour que le droit à l’eau  soit mis en œuvre en France. Sa  Charte de l’Eau adoptée en mars 2000 contient l’affirmation selon laquelle « Son accès à tous doit être un droit imprescriptible ». Entre 2002 et 2016, plusieurs de ses membres  ont publié une vingtaine d’ouvrages sur divers aspects politiques,  économiques et juridiques du droit à l’eau contribuant ainsi à la promotion de ce nouveau droit de l’homme. L’Académie souhaite que les travaux en cours dans ce domaine aboutissent à des résultats concrets afin de tenir mieux compte des besoins élémentaires des personnes les plus défavorisés.

Mots-clés :