
Un grau artificiel pour relier l’étang d’Urbinu à la Méditerranée
Le 12 juin dernier a eu lieu l’inauguration des travaux de réaménagement du grau de l’étang d’Urbinu à Ghisonaccia. Un projet de 4,8 millions d’euros porté par le Conservatoire du littoral de Corse pour garantir un échange efficient entre la mer et la lagune et ainsi préserver cette lagune méditerranéenne et les activités traditionnelles de pêche qui s’y déroulent.
Cette opération de restauration et de valorisation qui a nécessité un an de travaux a été permise grâce au soutien financier du plan France relance, de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse et de l’AFITF.
L’étang d’Urbinu, haut lieu de biodiversité
Cette lagune d’environ 790 ha et jusqu’à 9 m de profondeur, soit le deuxième plus grand et plus profond étang de Corse, abrite des espèces de faune et de flore remarquables ayant justifié son classement en site Natura 2000. L’avifaune y est très présente. En effet, l’étang d’Urbinu et ses zones humides connexes (telles que le marais de Piobi) sont des lieux de quiétude et d’alimentation pour l’avifaune. Comme toutes les lagunes méditerranéennes, elle accueille ainsi les oiseaux marins juvéniles qui y restent une partie de leur vie. Un programme Life a également permis la mise en place d’un radeau de nidification pour favoriser les populations de laro-limicoles (tels que les goélands, les mouettes ou les sternes).
Un grau artificiel pour maintenir les échanges mer-étang
L’étang d’Urbinu est alimenté principalement par des petits ruisseaux temporaires constituant un apport en eau douce relativement faible. Le rôle du grau est donc déterminant pour assurer, notamment, le renouvellement des eaux. Il en constitue la véritable clé de voûte de son fonctionnement et :
- Assure le renouvellement de la masse d’eau de l’étang, socle de la biodiversité présente ;
- Empêche les crises dystrophiques en période de sécheresse ; sécheresses dont la fréquence est appelée à augmenter sous l’effet du changement climatique ;
- Assure le recrutement naturel en poissons marins (notamment entre les mois de janvier et de mai) tant pour la biodiversité que pour les activités économiques de pêche ;
- Favorise le cycle de vie et de reproduction des poissons migrateurs, en particulier l’anguille européenne.
Aménagée dans les années 70, l’embouchure de l’étang d’Urbinu a évolué au fil du temps en fonction des différents besoins de l’activité piscicole et de l’accumulation de sédiments à l’intérieur de l’étang. L’ensablement progressif du grau sous l’effet des courants de la dérive littorale sud-nord, aggravé par des apports de sable exceptionnels lors des tempêtes de nord-est, réduit ainsi son efficacité. Un dragage régulier est indispensable
Les matériaux issus des travaux de dragage successifs, déposés de part et d’autre du chenal, ont créé une plateforme sableuse de plus en plus importante au fil des décennies. La forte dégradation des ouvrages initiaux devenus vétustes (musoirs, palplanches et enrochements), l’allongement du chenal jusqu’à atteindre 350 m et du prodelta de marée ainsi que l’impossibilité de franchir le chenal pour accéder au sud du grau pour le désensabler, complexifient considérablement les opérations d’entretien assurées par la Collectivité de Corse, gestionnaire du site. La situation est donc devenue critique, nécessitant une intervention d’ampleur afin de garantir la qualité du milieu et la poursuite des activités traditionnelles de pêche.
Des travaux conséquents, fruit d’une longue réflexion
Depuis 2007, date d’acquisition de l’étang d’Urbinu par le Conservatoire du littoral, de nombreuses études ont été réalisées afin de mieux comprendre (pour ensuite mieux gérer) le fonctionnement hydraulique de l’étang et de l’embouchure avec le soutien de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse.
Les travaux, débutés à l’automne 2023 et terminés au printemps 2025, visent à pérenniser les échanges entre l’étang et la mer par un aménagement hydrauliquement efficace et spécialement conçu afin de faciliter les interventions à l’aide d’un engin pour le désensablement régulier du chenal et le transfert du sable du sud vers le nord du grau selon le principe du by-pass mécanique. Les travaux ont été l’occasion de restaurer le paysage de cette zone nord du lido qui a été dégradée par des décennies de pratiques et d’aménagements inappropriés en plein cœur d’un large espace protégé.
> Voir le film "A la source : comment éviter d'un étang se referme ?"
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