> MARDI 20 OCTOBRE 2015 |
Laurent Roy |
Fonction Directeur général de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse |
Redonnons à l’eau sa place centrale pour la qualité de vie et le développement local
L’eau est un avantage compétitif pour la vitalité économique de nos territoires, leur attractivité et leur offre touristique. Tous les ans, en France, l’eau mobilise 4,2 milliards d’euros d’investissements publics soutenus grâce aux recettes fiscales perçues par les agences de l’eau. Elle génère 9,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour les activités liées directement aux ressources en eau (hydroélectricité, vente de poissons, de coquillages, pisciculture, eaux minérales, thermalisme, pêche de loisir). L’eau, c’est aussi 174 000 emplois directs, qui plus est dans leur grande majorité non délocalisables.
Et le potentiel est encore bien supérieur. La seule question de la rénovation des réseaux d’eau et d’assainissement devenus fuyards représente par exemple un défi en matière d’investissements pour les collectivités : dans le bassin Rhône-Méditerranée (quart sud-est de la France), cet investissement serait ainsi d’environ 350 M€ chaque année si toutes les collectivités réparaient les fuites de leur réseau d’eau. Mais ces investissements, ce seraient aussi 3 500 à 4 000 emplois supplémentaires à créer localement. Et en sus, ce sont pour les collectivités et les ménages, des économies sur les frais de pompage et de traitement de cette eau perdue.
Il est temps d’intégrer tous les bienfaits sociaux et économiques de l’eau dans les territoires. Les choix opérés pour l’eau sont aussi des choix pour la santé de nos concitoyens, pour l’économie, l’emploi, la biodiversité, le lien social. Ce sont des choix durables. Les financements sont disponibles, grâce au dispositif des agences de l’eau ainsi qu’aux prêts très bonifiés accordés par la Caisse des dépôts et consignations. L’expertise et la connaissance ne manquent pas non plus. Beaucoup d’élus de nos territoires ont déjà compris la nécessité de se mobiliser. Le mouvement est en marche, mais il faut aller plus loin.
Il est grand temps de réconcilier écologie et économie, de sortir de nos modes de production et de consommation destructeurs tant pour notre environnement que pour l’homme.
La politique de l'eau des prochaines années suit un cap : la croissance bleue. Elle a notamment pour priorités la chasse au gaspillage d'eau et la réduction des pollutions par les nitrates, les phytosanitaires et les micropolluants, plutôt que le recours à des traitements coûteux qui pèsent sur la facture d’eau, pour rendre l'eau potable. Elle prône aussi une « nouvelle » gestion des rivières, plus naturelle et jouant mieux avec la nature : moins de béton, de digues, de barrages et de seuils, et plus de liberté pour les cours d’eau là où c’est possible, avec des berges douces, des zones naturelles d’expansion des crues, des méandres, de la végétation. Ainsi, on améliore non seulement la qualité de l’eau, mais on fait aussi vivre le tourisme vert et les activités de pleine nature. On joue la carte de l’attractivité du territoire, du cadre de vie et on crée du lien social autour de la rivière.
L’eau est tout cela à la fois : elle fait vivre un territoire, ses habitants et son économie.